125 ans après, « Le Bardo », la grande Valse pour piano, du compositeur français Henri Boubal a été jouée aujourd’hui par le musicien Bassem Makni de l’Orchestre symphonique de Tunisie.
Dédiée en 1890 au Bey de Tunis, Ali Bey qui fut à l’origine de la fondation du musée Alaoui appelé après l’indépendance Musée national du Bardo, cette œuvre classique a été rejouée, en hommage au Musée national du Bardo à l’occasion de sa réouverture officielle, une semaine de l’attentat terroriste perpétré, le 18 mars 2015, faisant de nombreux blessés et victimes parmi les citoyens tunisiens et touristes étrangers.
Enveloppés dans les drapeaux des pays de tous les touristes victimes de cet attentat, de jeunes enfants portant le drapeau aux couleurs rouge et blanc ont crié fort « nous sommes le cœur de la Tunisie ».
Avec cet hymne à la patrie, ils ont déployé leurs corps au rythme de multiples compositions joués par l’Orchestre symphonique tunisien, dirigé sous la houlette de Hafedh Makni. Aux sons des multiples morceaux de répertoires de chaque pays ayant perdu des vies humaines lors de la journée du 18 mars dernier, les enfants de la chorégraphe Sihem Belkhodja ont tenu, avec le sourire aux lèvres, à participer à cette fête dans un message simple et fort
à leurs amis étrangers « Ne quittez pas la Tunisie ».
En présence d’un grand nombre de personnalités nationales dont le président de l’ARP, des représentants de différentes sensibilités politiques et des députés, de la ministre de la culture, du secrétaire général de l’UGTT, d’ambassadeurs accrédités en Tunisie, hommes d’affaires, artistes, comédiens, chorégraphes et de tous les « Amis du Bardo », la cérémonie officielle s’est déroulée dans le hall du musée en face de la célèbre mosaïque de Sousse, symbole du triomphe de Neptune.
Les amis du Bardo témoignent
Dans ce haut lieu de mémoire, Latifa Lakhdhar ministre de la culture et de la sauvegarde du patrimoine a déclaré à l’agence TAP que « cet élan de solidarité est un message fort pour dire non au terrorisme et que la Tunisie ne cèdera pas et qu’elle sera toujours un pays de culture et de partage ».
« la force de la vie que nous puisons dans la volonté de vivre comme a dit Abou el Kacem Chebbi, exprime au mieux la détermination du peuple tunisien à faire face à toute forme de violence, de haine et de terrorisme » a tenu à préciser Samir Cheffi, secrétaire général adjoint de l’UGTT ajoutant que « rien ne pourra empêcher les tunisiens de relever le défi, celui de poursuivre le processus de la dignité, de la liberté, de la justice sociale et de la fraternité ».
« c’est un grand moment d’émotion, de douleur mais aussi d’admiration face à ce fort mouvement de solidarité collective » a témoigné le directeur de l’Institut Français de Tunisie, Patrick Flot. « On ne peut être que solidaire avec la Tunisie toute entière » a-t-il relevé ajoutant que »l’IFT continuera de soutenir la coopération tuniso- française notamment dans le domaine culturel surtout que le Musée du Louvre et le musée du Bardo s’apprêtent à la finalisation de la dernière étape de la restauration et du réaménagement muséographique de la salle de Carthage qui offrira à voir les beautés du patrimoine tunisien » a- t-il signalé.
L’artiste Sonia Mbarek, directrice de la 51ème édition du festival international de Carthage a, quant à elle, souligné que « la Tunisie ne pourra gagner le combat contre le terrorisme que par un plan d’action national global à court et moyen terme ». A ce propos elle a expliqué qu’en dehors de la stratégie politique, militaire et sécuritaire, il est impératif que cette stratégie englobe le domaine de la culture, une mission qui incombe non seulement aux hommes de la culture, aux artistes et aux créateurs mais aussi aux éducateurs. La culture et l’éducation aux valeurs humaines sont désormais une urgence pour pouvoir combattre la violence, l’ignorance et l’intégrisme, pires ennemis de la culture de la valeur humaine, a-t-elle relevé.
A son tour, Mohamed Zine el Abidine, directeur de l’Institut supérieur de musique de Tunis a relevé qu’il est temps aujourd’hui « d’agir vite et d’une manière efficace pour remettre les pendules à l’heure car il faut reconnaître qu’il existe un vide dans le débat autour du r »le de la culture et de l’art dans la lutte contre le fléau du fanatisme en Tunisie.
Mesures draconiennes autour et dans le musée national du Bardo
La réouverture du musée en un temps record, a estimé le comédien Fethi Heddaoui est « la preuve éloquente que le peuple tunisien est un peuple qui aime la vie ». Il a, à ce propos, insisté sur la nécessité de renforcer l’offre culturelle et artistique dans toutes les régions du pays ce qui constitue « un rempart imprenable contre le fléau du terrorisme ». « Blessé, certes, mais le Musée du Bardo se redresse, dieu merci, pour devenir encore plus grand » a-t-il mentionné.
De son côté, la députée Mbarka Aouinia Brahmi a appelé « à prendre les mesures sécuritaires nécessaires à l’avenir éviter de tels événements tragiques et à être plus vigilants pour préserver la patrie ».
Placé sous haute surveillance sécuritaire, le musée du Bardo où des mesures draconiennes ont été prises, a connu un grand dispositif d’inspection. Face à une véritable marée humaine -invités et médias nationaux et étrangers-, un grand nombre d’agents de l’ordre est intervenu pour assurer l’organisation et faciliter l’entrée au musée où des bouquets de fleurs et divers messages de solidarité ont été déposés en guise de soutien après le chaos. Mais « la plus grande gloire n’est pas de ne jamais tomber mais de se relever à chaque chute » écrivait le philosophe chinois Confucius dont la pensée repose sur le tissage d’un réseau de valeurs dont le but est l’harmonie des relations humaines.